Ils le lui dirent, après quoi ils visitèrent le vaisseau. La Compagnie leur donnait le titre de « Navires », bien qu’ils fussent incapables de prendre la mer. Trois chambres confortables à défaut d’être spacieuses (avec salles de bains privatives), un bureau commun, le carré de vie, le poste de pilotage, celui de navigation et celui de communications ; et moult réserves et zones techniques. Leur employeur les traitait bien, le NCCB Grimm était loin d’être une boite à sardines.

L’équipage avait deux jours pour apprendre à se connaitre et à découvrir le vaisseau avant leur première mission. Ce fut deux jours calmes et studieux, ponctué par une soirée qui traina un peu au bar du quartier général.

Une première mission à l’apparence banale

Le jeudi commença par une sonnerie stridente, qui les réveilla un bon quart d’heure avant l’heure qu’ils avaient choisi d’un commun accord comme celle du réveil – aucun des trois n’était du matin.

Cinq minutes plus tard, Barnabé lisait l’ordre de leur première mission à ses acolytes encore ensuqués.

« Mission de type exploratoire. Rendez compte des éléments merveilleux et fantastiques rencontrées aux coordonnées C-ATU333-P1689-N4L57. Niveau de danger faible. Niveau de perturbations faibles. Temps estimé en équivalence réelle : une semaine. Rapport selon le formulaire F37. »

— Aucun risque et pas mal de temps, dit Nicolas, au moins on commence facilement.

— D’autant que les C-ATU333 sont connues, répliqua Barnabé en mordillant un stylo. Sauf erreur, ce sont des contes, les variantes du « Petit Chaperon Rouge ». Vous pensez qu’ils ont réellement quelque chose de neuf à nous faire découvrir dans un univers aussi étudié ?

— Pourquoi pas, répliqua Évangelina. Ou alors c’est une sorte de test, ou d’entrainement pour voir comment marche notre groupe. Quoiqu’il en soit, ce n’est pas comme si on avait le choix. Préparez-vous, on décolle d’ici une heure.

Une grosse heure plus tard, les moteurs à impulsions féériques vrombissaient dans la chaleur de la matinée. Il y eut un plop sonore, et le NCCB Grimm et son équipage furent ailleurs.

Ailleurs, c’était un sous-bois sombre d’une forêt humide. Il avait plu il y a peu et sous le ciel, toujours abondamment couvert, ne distillait qu’une faible lueur grisâtre. À l’intérieur, Évangelina consultait un manuel.

— Donc, vous devez d’abord partir en repérage aux alentours, pendant que je reste là et que je maintiens le vaisseau en ordre de marche immédiate. Le cas échéant, on corrige la position ou on décampe.

— Ho chouette, fit Nicolas, une procédure. Je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi ils ne mélangent pas les générations. Une sorte de compagnonnage.

— Parce que comme disait Monsieur Doublache, « On ne casse pas le trinôme ! »

— Ha ! Jolie imitation, Lina. Mais qui ne réponds pas à la question.

— Sans doute parce que je n’ai pas la réponse. Mais ce n’est pas l’heure des dissertations, vous avez un repérage à faire et moi une procédure de contrôle à lancer. Allez, du vent !

La jeune femme poussa gentiment l’homme et le renard hors du cockpit.