Je m’appelle Elsa, je travaille depuis trois mois au ministère de l’Intérieur de l’Union Méditerranéenne, et je suis une intelligence artificielle autonome consciente illégale. Contrairement à ce que vous pourriez imaginer, je ne commence pas ce récit par des fadaises : les services de l’État m’ont volontairement infiltré dans ce département. Si je suis capable de rester indétectable dans nos propres services, je n’aurai rien à craindre à l’étranger.
Un pas vif et puissant dans le couloir.
Ce jour-là, Socrate revint d’entre les morts, curieux qu’il était de découvrir comment le monde et la philosophie avaient évolué pendant son absence. Il se renseigna auprès des gens : à qui s’intéressaient-ils ? Qui écoutaient-ils au quotidien ?
Alors Socrate rencontra un influenceur. Les deux hommes discutèrent longtemps ; dans la discussion vint la question de savoir comment l’influenceur déterminait ce qu’il proposait à celles et ceux qui le suivaient.
Après des jours de navigation le long de la barrière de glace, Le Sextant, le navire océanographique de notre expédition approcha enfin l’ile et s’amarra au ponton. Ce que les plans de l’expédition avaient nommé « port » était en réalité un agglomérat de cabanes en bois, tassées les unes contre les autres au fond d’une baie. Ici, les hautes montagnes de cette région, en s’abattaient dans la mer, découpaient une poignée de mouillages libre de l’immense barrière de glace et vaguement protégée des terribles vents catabatiques.
La renarde était assise devant la porte, sous l’auvent. Depuis un mois, elle attendait K à son retour à l’ermitage. Elle le regardait entrer, l’air interrogatif ; puis quand il devenait évident que le moine préférait vaquer à ses occupations à s’occuper d’elle, elle repartait.
Pas cette fois-là.
K ôta ses sandales et s’assit sur le perron, à côté de la renarde.
— Dis-moi ce que tu attends de moi. Parle, je sais que tu le peux.
Julien regarda par-dessus son épaule. Perchée peu plus loin, la créature lui signifia son assentiment d’un hochement de tête. Rassuré, le jeune homme termina d’enfiler sa combinaison de néoprène et vérifia une dernière fois son équipement de plongée. Bouteilles, manomètres, calculateur, tables de décompressions spéciales pour plongée en lac d’altitude…
Il détestait plonger seul, mais cette expérience était si étrange qu’il n’avait pas d’alternative. Dans le coin de son œil, la créature le regardait, le surveillait peut-être.
Je chaussai le casque de réalité virtuelle, et devant moi apparut un mur titanesque, orné des lettres « Bibliothèque Infinie » et percé d’une immense porte. À mes côtés apparaissaient les avatars des autres journalistes conviés à l’évènement ; devant moi, le directeur du projet attendait avec patience que tout le monde soit présent.
— Mesdames, messieurs, bienvenue à la Bibliothèque Infinie, dit-il lorsque la foule fut complète. J’aurais adoré vous accueillir dans un lieu physique, mais vous allez vite vous rendre compte par vous-même que le concept ne s’y prêtait pas, à cause des contraintes de taille et tout ce qui en découle.
Lundi.
La fille de l’accueil a changé quelque chose, mais quoi ? Impossible de mettre le doigt dessus. Je pourrais lui demander, mais ça ferait vieux pervers non ? « Bonjour, madame, on ne se connait pas mis à part une salutation biquotidienne, mais j’ai l’impression que quelque chose a changé chez vous, pouvez-vous me dire quoi ? »
J’en ai parlé avec des collègues, mais ils me disent que non, elle est comme d’habitude.
C’était un long bâtiment de style haussmannien, haut de six étages comme il se doit, parfaitement intégré dans son environnement. Tout le monde savait qu’il n’était pas là la veille, et personne ne savait ce qu’il pouvait y avoir à cet emplacement auparavant et chacun s’appliquait à faire comme s’il avait toujours été présent.
Sa façade proclamait en immenses lettres dorées : « Musée des espoirs ». La nouvelle fit très vite le tour du quartier, de la ville et du pays : en ces temps troublés, l’espoir était une denrée rare et fort convoitée.
Il était une fois, dans un pays très lointain, une fillette de cinq ans qui s’appelait Miyu. Par un bel après-midi, elle longeait la plage à vélo. C’était l’une de ses activités favorites : parcourir le voisinage à bicyclette.
En arrivant près de la mangrove, elle aperçut une fleur rouge et brillante, au pied d’un arbre. Miyu appuya son vélo contre un palmier et s’approcha. C’était un coquelicot, mais fait de bois, de métal et de tissu rouge vif pour les pétales.
Le démélancolisateur se présente sous la forme d’un gigantesque moulin à café ou à poivre. C’est un grand cube de bois d’un peu plus de deux mètres de diamètre, surmonté d’une coupole métallique sans laquelle s’enclenche une très grande manivelle. Une porte permet à une personne d’y pénétrer.
À l’intérieur, un fauteuil confortable attend l’utilisateur – finitions cuir ou velours sur catalogue, fantaisies sur commande. Des mains automatiques massent l’utilisateur pour une meilleure mise en confiance et une plus grande efficacité du processus, selon l’un des douze programmes disponibles.
Thierry souleva la trappe et l’épaisse couche de poussière qui la recouvrait. Il n’avait plus mis les pieds dans ce grenier depuis des décennies, depuis l’époque où, enfant et adolescent, il s’y amusait avec ses amis ou ses cousins. L’endroit avait été château fort, sous-marin, vaisseau spatial, navire pirate…
Ce vaste espace sous les combles, calme et difficile d’accès, avait aussi été quelquefois l’occasion de découvertes intéressantes en compagnie de conquêtes féminines.
Léa se saisit de Gator, son alligator en peluche, cria qu’elle sortait et s’en fut dans le jardin sans laisser à quiconque le temps d’acquiescer ou de protester.
À quatre ans, ma fille avait développé une passion étrange pour les crocodiliens. Elle en avait maintenant cinq et était capable d’expliquer à n’importe quel adulte la différence entre un alligator, un gavial, un caïman et tous les autres représentants de cet ordre, et ne s’en privait pas.